À nous la ville!

Jonathan Durand Folco échange avec Paul Germain, maire de Prévost – photo de la diapo : Diane Brault
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Les réponses du municipalisme par Jonathan Durand Folco

Émilie CorbeilLe livre À nous la ville ─ Traité de municipalisme a fait bonne impression sur le maire de Prévost. Si bonne qu’il a décidé d’inviter l’auteur, Jonathan Durand Folco, à venir donner une conférence. Chercheur à l’Université Saint-Paul d’Ottawa, monsieur Durand Folco a pu faire profiter les citoyens de son expertise le 16 septembre dernier, à l’hôtel de Ville de Prévost.

Pour peu que l’on ait fait l’expérience de la participation citoyenne, il est possible d’avoir un avant-goût de ce qu’est le municipalisme : une prise en charge à l’échelle municipale.

Si l’idée n’est pas nouvelle, les solutions qu’elle peut apporter à certains problèmes d’actualité nous forcent à y revenir. L’auteur fait le postulat d’un monde en détresse, parlant de réchauffement climatique, d’inégalités économiques, de perte d’identité culturelle et de confiance envers les institutions démocratiques. La crise étant abordée comme un moteur de changement social, c’est un changement émergeant de la Cité qu’il propose. Sans trop en venir aux bases théoriques, il mentionne le modèle de démocratie directe propre à la Grèce antique et l’aristocratie foncière du Moyen âge, cette dernière ayant fait office de contre-pouvoir face aux rois européens.

On mêle ici, à juste titre, les concepts de démocratie et de territoire pour en arriver à la conclusion qu’en réduisant l’échelle, on augmente le pouvoir du peuple. La vie en société doit être organisée par la base afin d’être satisfaisante et juste pour le plus grand nombre. Les changements souhaités et acceptables doivent être effectués de proche en proche, par les personnes directement concernées.

Lieu physique du partage des expertises, des espaces de vie et des communs, la municipalité est capable de transformer socialement, économiquement et politiquement. Pour Durand Folco, cette dernière est la plus à même d’incarner le principe de subsidiarité et de procéder à un repartage des pouvoirs vers la base. Bien davantage, enfin, que les gouvernements provincial et fédéral, le résultat en serait que les décisions iraient dans le sens de l’égalité et du bien commun.

Et quand les citoyens sont invités à prendre directement les décisions pour eux-mêmes, on voit naître des initiatives innovantes et positives. Les exemples sont parlants : Coopératives d’habitation et de partage d’équipement, jardins communautaires, micro-transport en commun, circuits courts d’approvisionnement, petites entreprises territorialisées, etc. Tous ont cours quelque part, à l’heure actuelle. Il s’agirait maintenant de généraliser les initiatives.

Le modèle de Saint-Camille

Au Québec, la municipalité de Saint-Camille fait figure de proue en ce qui concerne le municipalisme. Dévitalisée pour avoir été victime d’un exode vers les zones urbaines et comptant moins de 440 âmes au début des années 1980, cette localité des Cantons de l’Est a choisi de substituer la convivialité au profit. Le magasin général fermé, il fut racheté par des membres de la société civile, le Groupe du coin, et sert aujourd’hui d’espace commun. Plusieurs dizaines de bénévoles ont transformé un espace désaffecté en centre multifonctionnel, permettant d’y conserver la Caisse Populaire, la caserne de pompiers, le bureau de poste, la maison des jeunes et les bureaux municipaux. Pour un peu plus de 500 habitants, le village compte quelques 30 coopératives touchant maints domaines (agriculture et agroforesterie, logement, soins aux aînés, éducation, innovation sociale, etc.). À Saint-Camille, les citoyens s’occupent des citoyens. Ils ont cessé de compter sur l’État ou sur le marché pour assurer leur bien-être. Ce faisant, il n’a pas été question de permettre à l’exploitation minière et gazière de gagner le territoire. C’est avec légitime désinvolture qu’ils peuvent tourner le dos aux diktats de l’exploitation des ressources naturelles.

Force est de constater, toutefois, que la grande majorité des municipalités du Québec ne fait pas face à une telle menace de disparition. Il faut ici revenir au postulat d’origine de Durand Folco : C’est la crise qui rend le changement nécessaire. C’est généralement devant l’ultime que les citoyens s’investiront à la manière de ceux de Saint-Camille.

Mais il n’est jamais trop tôt pour se questionner au sujet des pouvoirs qui nous sont impartis. De toute évidence, c’est une réflexion que le maire invite sa population à faire. Une main tendue et un appel à la participation citoyenne. Souhaitons que les Prévostois et Prévostoises saisiront l’occasion et auront envie d’incarner les changements qu’ils souhaitent voir advenir autour d’eux.

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