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Se plonger dans l’univers de En Tandem et Une solitude
Noa Garcia-Ahmad : noaga@journaldescitoyens.ca – Dans les derniers mois, le Journal vous a présenté la programmation de l’édition 2021 du Festival des Arts de Saint-Sauveur (FASS) ainsi que ses directeurs, Guillaume Côté et Étienne Lavigne. Bien que le Festival ait déjà pris fin, les plus curieux auront encore la chance d’assister aux prestations de plusieurs artistes québécois et canadiens dans le cadre de la programmation virtuelle. Pour se plonger dans l’univers des projets En Tandem et Une solitude partagée, le Journal s’est entretenu avec Jera Wolfe et Louis Dufort.
En Tandem avec Jera Wolfe
Le projet En Tandem, réalisé par le Torontois Ben Shirinan, est la plus récente production virtuelle du Festival des Arts de Saint-Sauveur (FASS). À travers quatre films qui jumellent des artistes en danse de divers styles avec des artistes d’autres disciplines, tels que la poésie, l’opéra, la musique gospel et la musique classique, le projet En Tandem est une sorte de suite à Une solitude partagée, le projet virtuel de l’édition précédente du Festival qui avait été couvert de succès.
Parmi les quatre vidéos, on retrouve notamment la prestation de Jera Wolfe, un artiste et un chorégraphe de danse d’héritage Métis, accompagné de Natasha Kanapé- Fontaine, une écrivaine et poétesse autochtone, dans une vidéo intitulée Tshishikushkueu (Femme de l’Espace). Dans la vidéo de sept minutes, madame Kanapé-Fontaine récite un poème poignant de son recueil de texte Bleuets et abricots, adapté pour la scène, qui aborde notamment l’émancipation de la femme autochtone à travers un texte qui rappelle la culture innue. Aux côtés de la poétesse, M. Wolfe délivre une chorégraphie qui incarne l’esprit innu du chasseur. Pour M. Wolfe, le poème de Kanapé-Fontaine était si puissant qu’il n’avait besoin de rien d’autre pour lui insuffler de l’énergie : « Her words built a fire that I could feel in my stomach. As she spokes, it would give so much energy. I think that was very much the impetus for me to move. »1. Il rajoute également que l’idée d’incorporer l’esprit innu dans sa prestation est devenue un élément fondateur de sa chorégraphie : « I can imagine that if you were hunter and you needed to find food and you’re going days and days travelling, sometimes you can get delirious and also get lost in the woods. So, conjuring these spirits to find your way, it’s very powerful »2.
Il ne s’agissait pas d’une première apparition virtuelle pour Jera Wolfe : dans la dernière année, il a notamment réalisé son spectacle Begin Again qui a d’abord été présenté en vidéo, avant d’être adapté pour la scène, entre autres, pour le FASS. Selon M. Wolfe, le virtuel apporte quelque chose de très différent à la scène : « When you do a video, sometimes it comes out and you’re like “Wow, that’s what we look like ?” or “Wow that looks scary or sad”, but when you did it as a performer, you weren’t sad. The cameras angles, the shadows, and all of that creates a very different response »3.
Une solitude partagée avec Louis Dufort
La programmation virtuelle de l’édition de 2020 est toujours disponible sur le site du Festival. Le projet Une solitude partagée est né d’une collaboration entre l’Orchestre Métropolitain et le Festival qui ont invité dix chorégraphes et dix compositeurs à créer des œuvres originales. Une solitude partagée a été visionnée plus de 200 000 fois à travers le globe en plus de se voir décerner le prix Opus de diffuseur de l’année.
Parmi les 10 films, tous réalisés par Louis-Martin Charest, on retrouve Sur la lame, une chorégraphie créée par Marie Chouinard accompagnée de la composition musicale de Louis Dufort. Interprétée par la danseuse Valéria Galluccio et le percussionniste Alexandre Lavoie, la prestation prend place dans la forêt boréale de Saint-Sauveur, comme l’ensemble des 10 œuvres réalisées. Pour Louis Dufort, un compositeur montréalais qui se démarque notamment pour ses compositions électroacoustiques, mais également pour sa collaboration de longue date avec Marie Chouinard, un projet comme Une solitude partagée était une occasion à ne pas manquer : « Le projet amenait une petite lueur pour les artistes. Personne ne parlait de faire des projets à ce moment-là, on était tous un peu sur le neutre. Et là, on a eu un projet super intéressant avec Marie Chouinard et avec Maestro (Yannick Nezet-Séguin) ». Le choix des percussions, et plus particulièrement du tam-tam, un instrument de percussion que l’on retrouve particulièrement dans la musique orientale, était une évidence pour le compositeur : « J’ai remplacé la nature par l’instrument que sont les percussions. Donc j’ai utilisé le tam-tam, une sorte de géante cymbale accrochée, qui permet de faire toutes sortes de sons. On peut, entre autres, simuler des sons de la nature ».
Par le passé, M. Dufort a beaucoup travaillé avec la nature et les forêts. En mars dernier, il a notamment produit un album nommé Volume sur étiquette Superpang dont plusieurs des titres s’inspirent de la forêt. Il prépare également un nouvel album qui sortira en octobre sur étiquette empreinte DIGITALes, intitulé Into the Forest. Pour monsieur Dufort, les sons de la nature n’ont rien d’anodin : « Quand j’entends du vent, ce n’est pas un bruit blanc pour moi : il y a plein de subtilité. J’ai fait plein de prise de son en lançant des cailloux, en tordant des branches, etc. ».
Les réalisations de En Tandem et de Une solitude partagée sont toutes disponibles sur le site Internet du Festival des Arts de Saint-Sauveur. En plus de ces deux projets, les plus curieux pourront également visionner les dix films finalistes du Festival international de court-métrage de danse, FASS Forward. Parmi les finalistes, on retrouve notamment des artistes de la Suisse, de l’Allemagne, de la Pologne et bien évidemment, du Canada.
1. Ses paroles ont créé une flamme que je pouvais sentir dans mon ventre. Ces mots me donnaient tant d’énergie. Je crois que c’était vraiment ça qui me donnait la force de bouger. »
2. Je peux imaginer qu’un chasseur qui voyage et qui cherche dans la nature pendant des jours et des jours pourrait devenir fou et se perdre en forêt. Donc, appeler ces esprits pour trouver son chemin, c’est un acte très puissant.
3. Quand on réalise une vidéo, des fois le résultat nous surprend. On se dit « Wow c’est vraiment ce dont on a l’air » ou « Wow, ça semble épeurant ou triste » alors que lorsque tu l’as fait en tant qu’interprète, tu n’étais pas triste. Les angles de caméras, les ombres et tout cela crée un résultat parfois très différent.