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À la rencontre de gens d’exception : Gilles Boyer
Normand Gosselin – Claude Boyer à 94 ans, goûte encore et toujours au meilleur de ce que la vie a à offrir. Il l’a toujours fait, tirant profit de toutes les occasions intéressantes se présentant sur son passage. Débrouillard, rusé, déterminé, il saisit toutes les bonnes occasions et lorsqu’il ne s’en présente pas, il en crée !
Natif de Sainte-Anne-des-Lacs, il ne s’est absenté que pour des études ou pour exécuter des contrats de maçonnerie, qu’ils soient pour des habitations résidentielles ou des édifices publics comme une église. Jusqu’à ce qu’il parvienne à bien gagner sa vie dans son village d’origine. Parlant d’études, à une certaine époque, il fréquentait l’école de Shawbridge et s’y rendait parfois en ski l’hiver; le ski était aussi le moyen de transport pour aller à l’église de Saint-Sauveur.
Déterminé, disions-nous : lorsqu’un petit groupe de ses concitoyens voulait faire construire un aqueduc et des égouts dans Saint-Anne-des-Lacs en 1961, il a regardé autour et a constaté que certaines municipalités l’avaient fait, mais en s’hypothéquant sérieusement. Conscient que Saint-Anne-des-Lacs est construite en montagne, donc sur le roc, il faudrait dynamiter et transporter beaucoup de gravier et de sable pour réaliser le projet; les coûts lui ont semblé faramineux; il s’est fait élire maire, à 33 ans, avec cinq voix de majorité, puis a pu faire disparaître ce projet. Il a dû faire modifier le zonage et rendre obligatoire que les terrains aient un minimum d’un acre de superficie pour qu’on ait le droit de les bâtir, soit l’espace nécessaire pour y creuser un puits artésien et une fosse septique. Il est resté maire pendant environ 45 ans, plus souvent qu’autrement réélu par acclamation, personne « n’osant » se présenter contre lui, à quelques exceptions près, qui n’y ont vu que du feu. Il y a eu un intermède de deux ans pendant son cancer; il y a alors eu un maire suppléant, ce qu’on appelait à l’époque un pro-maire. Par contre, il a aussi été préfet du comté qui s’étendait de Mont-Laurier au nord, jusqu’à Sainte-Thérèse, en Basses-Laurentides.
À l’âge de 23 ans, en 1951, il a épousé une jeune enseignante de 18 ans, Lucille, avec qui il est devenu père sept fois, en six grossesses. Sa descendance compte 13 petits-enfants et 10 arrière-petits-enfants. Une famille tissée serrée, alors que cinq de ses enfants habitent toujours Saint-Anne-des-Lacs et les deux autres à moins de 30 minutes de route. Sept enfants ? Chacun a une journée par semaine pour prendre soin du paternel qui habite toujours la maison qu’il a construite il y a plus de 50 ans; c’est d’ailleurs l’une des jumelles, Lorraine, qui était proche aidante le jour de l’entrevue pour cet article. Des maisons, il en a construit une centaine.
La joie de vivre est toujours bien ancrée en lui. Ses yeux brillent lorsqu’il parle d’avoir exploité un restaurant, tout petit, 12 pieds par 12, avec trois tables. Son épouse, qui était à la barre de l’entreprise, en avait marre des gens qui venaient y jouer aux cartes jusqu’à tard en soirée, alors l’entreprise fut transformée en épicerie, puis graduellement en quincaillerie, jusqu’à devenir un distributeur de matériaux de construction, aujourd’hui propriété de son fils Robert.
Les loisirs ?
La famille, l’entreprise, la mairie, Claude allait-il négliger cet aspect ? Nenni ! Jeune adulte, les veillées de danse et de chant entre amis étaient coutume, et lui ont permis de rencontrer la belle Lucille en 1950. Et ils ont continué d’y participer, mais Claude étant un grand amateur de ski, il a aussi continué à s’y adonner et a participé à de nombreuses compétitions, autant dans les Laurentides qu’ailleurs, dont à Whistler, en Colombie Britannique. On raconte même qu’il empruntait le vernis à ongle de ses sœurs, du Cutex, pour enduire le dessous de ses skis pour augmenter la vitesse de glisse… le rusé !
Printemps, été et automne, c’était le club privé de chasse et pêche au nord de Clova, comptant 10 membres, club qu’ils atteignaient avec l’hydravion appartenant à un « des gars de la gang ». Bien sûr, ce club était pour hommes seulement, et constituait un lieu privilégié de communication entre eux, sans retenue… La famille en a été quitte pour manger beaucoup d’orignal et de truite fraîche.
Pour le couple et la famille, il y avait les voyages en Floride, et plus tard une maison au Costa Rica. Un voyage en caravane avec les deux plus jeunes les ont conduits jusqu’à l’océan Pacifique, avec retour par le nord des États-Unis, dont les fameux déserts du Montana.
Cependant, pas de temps pour les clubs sociaux et de fraternité comme les Chevaliers de Colomb ou les clubs Optimiste. La mairie demandait beaucoup de temps, mais il en trouvait un peu pour chanter à l’église.
Le plus beau jour de sa vie
Le cancer qui l’a tant affaibli au début de la cinquantaine lui a fait craindre le pire. D’ailleurs, il est revenu à plusieurs reprises sur ce sujet pendant l’entrevue. Donc, lorsque les médecins lui ont annoncé qu’il avait définitivement gagné la bataille, c’est devenu le plus beau jour de sa vie.
Claude Boyer, une vie qui s’étire doucement, en profitant de tout ce qu’il peut, et il semble qu’il puisse encore beaucoup malgré les jambes qui ne collaborent pas tellement. Un phénomène unique, ce Claude Boyer !