Vies de verbes

Gleason Théberge
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Gleason Théberge – En matière de conjugaison et d’accord, le verbe de forme unique n’a pas la vie compliquée du couple auxiliaire et participe passé. 

Utilisé seul, il agit comme une personne née célibataire, comme dit le Voisin. Dans les phrases de sa vie, l’accord avec son sujet sert, entre autres, à l’identifier s’il est trop loin de lui (Un couple de deux adultes, même sans enfants, constitue déjà une famille) ou provient d’une autre phrase (Mes amis voyagent beaucoup. Ils iront au Mexique l’été prochain). Avec les autres mots de la phrase, le verbe établit alors une harmonie à partir des significations que le contexte lui donne. Il peut ainsi avoir des compléments qui l’aident à préciser son sens. Dans Les pluies nourrissent les feuilles, il ne s’agit en effet pas du même genre de nourriture que dans La lecture des livres nourrit l’imaginaire de l’enfant.

Quand le verbe est introduit par avoir ou être, c’est comme s’il faisait partie d’un couple. L’auxiliaire porte l’accord du sujet et le verbe devient un participe. lié d’une manière déterminée par son auxiliaire de conjugaison. 

Avec avoir, la forme du participe dépend ainsi des compléments qui sont comme les enfants du couple. Il ne change pas s’il n’a pas de complément direct (Ils ont bien dormi : on ne dort pas quelque chose). Il en va de même quand le complément suivant le verbe identifie clairement sa relation avec lui (Elles ont changé leurs habitudes).

Le verbe ne s’accorde que si le complément n’est pas apparent, comme un enfant perdu, quand il a été remplacé par un pronom et placé avant le verbe. Un tel pronom peut être un que (Les propos que j’ai tenus), le, la ou les (La fenêtre je l’ai fermée Les assiettes du souper d’hier, je les ai lavées ce matin) ou du genre me, te, se, nous ou vous(Messieurs, je vous ai appelés, mais sans obtenir de réponse). Pour la compréhension de la phrase, l’œil lecteur doit pouvoir facilement trouver les enfants-compléments, si le couple auxiliaire-participe n’est pas près d’eux

Avec être, on peut dire que le verbe est en union libre. Il continue de s’accorder avec les sujets qu’on lui donne (Les ampoules du sapin sont allumées chaque soir jusqu’à Noël). Mais si deux pronoms identiques sont liés à l’auxiliaire être,on doit se demander si avoir est caché sous être. Il n’y aura ainsi pas d’accord dans Ils se sont donné la main : ils ont donné la main. Mais on accordera dans Ils se sont enfuis : on ne peut que s’enfuir soi-même.

Avec les semi-auxiliaires du genre aller, désirer, devenir, falloir, savoir, pouvoir, ce sont eux qui s’accordent avec le sujet au lieu du verbe. L’aventure amoureuse prend alors une allure déséquilibrée, car le verbe reste à l’infinitif et ne s’intéresse pas au sujet de la phrase, parfois un peu fantôme. C’est le cas avec Il faut accepter ses erreurs (personne ne faut) ou même s’il assume l’action ou l’état, comme dans les pacifistes savent parfois sourire devant l’insulte.

De belles histoires d’amour, et plus nombreuses que pour les verbes anglais, n’est-ce pas?

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