20e d’Abrinord

Nicolas Michaud
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Réalisations et défis

Nicolas Michaud – Le 15 juin 2023 célébrait les 20 ans d’existence d’Abrinord lors de son Assemblée générale annuelle. Sa directrice générale, Mélanie Lauzon, a rencontré le Journal des citoyens pour discuter des missions, des réalisations et des défis de son organisation.

« Abrinord, l’organisme de bassin versant de la rivière du Nord, est l’un des 40 organismes de bassins versants (OBV) officiellement reconnus par le gouvernement du Québec dans la Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et favorisant une meilleure gouvernance de l’eau et des milieux associés. L’organisme est responsable de planifier et de coordonner la gestion intégrée de l’eau dans la zone qui lui est confiée. Fondé en 2003, Abrinord constitue une table de concertation et de planification dont le mandat premier consiste à élaborer un Plan directeur de l’eau (PDE), à le mettre à jour, ainsi qu’à en promouvoir et suivre la mise en œuvre. » C’est donc de cette manière que l’organisme décrit sa raison d’être sur son site Web.

La qualité de l’eau en quatre paramètres

Il est bien connu que les principales sources de polluants proviennent essentiellement des retombées de matières atmosphériques; des effluents municipaux, industriels ou agricoles; et du lessivage des terres agricoles fertilisées, des sels de voirie ou des abat-poussières par les eaux de ruissellement. Pour brosser le portrait de la situation, Mélanie Lauzon explique qu’Abrinord analyse quatre paramètres précis en vertu du programme de suivi de la qualité des cours d’eau.

Le premier, la concentration en coliformes fécaux, indique la présence potentielle de bactéries et virus pathogènes, donc nuisibles à la santé humaine. Si les groupes de recherche préfèrent utiliser les coliformes par rapport à d’autres bactéries, c’est en raison de leurs propriétés non pathogènes et du fait qu’ils peuvent facilement être identifiés puis comptabilisés.

Le deuxième, la concentration en matières en suspension, révèle les solides en suspension dans l’eau et offre de précieux renseignements sur les sédiments et les niveaux d’érosion.

Le troisième, la concentration en phosphore total (un élément nutritif essentiel à la croissance végétale), peut déceler une croissance excessive des plantes aquatiques ou encore de cyanobactéries couramment appelées « algues bleues ».

Le quatrième, la conductivité spécifique, dénote les apports en sels minéraux qui peuvent modifier la composition chimique de l’eau ou encore faire varier le niveau de salinité.

Des paramètres indubitablement pertinents ?

Lorsque Mélanie Lauzon est interrogée sur la pertinence de ces quatre paramètres pour évaluer l’état des cours d’eau, elle se dit assez satisfaite de ceux qui ont été sélectionnés. Toutefois, cette bachelière en écologie de l’Université de Sherbrooke admet que s’il existe d’autres paramètres plus efficients à prendre en considération, leur coût d’analyse est nettement supérieur. Un coût qui serait beaucoup trop cher pour le budget alloué à Abrinord. Il faut s’en contenter, « se concentrer ce sur quoi l’on a les moyens », formule-t-elle, et « sur les autres polluants, on manque de données; il faudrait en acquérir plus ».

Néanmoins, cela n’empêche pas Abrinord d’ajouter d’autres éléments à surveiller au fil du temps. Pour cette année, la directrice générale annonçait que son équipe étudierait les chlorures, des composantes associées aux sels de voiries. Leur analyse permettrait de mieux documenter ses impacts sur les écosystèmes et aiderait les décideurs à mieux agir en conséquence. Il en est de même pour l’étude des pesticides, à l’occasion d’une collaboration entre Abrinord et l’Université du Québec à Montréal (UQAM), pour connaître leur dynamique en eau de surface, mais aussi en eau souterraine.

La problématique des surverses

Qu’est-ce qu’une surverse ? En peu de mots, il s’agit d’un déversement d’eau non traitée ou prétraitée dans l’environnement par les installations de traitement des eaux usées. Ce type de déversement est surtout attribuable à deux causes : la rénovation majeure d’une usine de traitement ou la surcapacité de cette usine lors de pluies diluviennes ou lors de la fonte abondante des neiges. C’est principalement la deuxième raison qui occasionne le plus de problèmes. En effet, lorsqu’il n’y a point de séparation entre les eaux usées et les eaux de ruissellement (de pluie), un réseau d’égout est dit unitaire comme c’est actuellement le cas pour un grand nombre de municipalités au Québec et dans la région des Laurentides. De ces faits, les probabilités de surverses deviennent donc plus fortes au cours des périodes de fortes pluies ou de la fonte des neiges au printemps. En outre, dans les espaces urbains, l’imperméabilité des surfaces bétonnées fait en sorte que toute cette eau s’achemine plus rapidement au réseau d’égout.

Pour remédier à cette problématique, la directrice générale d’Abrinord considère qu’il est de son devoir de sensibiliser et d’informer les municipalités et leurs habitants sur les moyens à prendre; notamment en invitant les villes à une plus grande séparation des égouts d’eaux usées et d’eaux de ruissellement, en favorisant l’infiltration des eaux de pluie dans le sol et en réduisant la consommation d’eau potable des ménages. Sur la question de la réfection des usines d’épuration des eaux usées pour tenir compte du débit total d’eau prévu lors des périodes de haut volume d’apport en eau, Mélanie Lauzon croit que ces mesures ne régleront pas totalement le problème à moins que tout le monde ne modifie ses habitudes. Elle rajoute que les Municipalités sont probablement prêtes à investir des fonds pour corriger leurs installations de traitement des eaux usées, mais qu’il faudrait des élus courageux pour aller de l’avant avec des hausses de taxes.


Carte des points de lecture des plans d’eau du bassin versant de la rivière du Nord – photo courtoisie

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